Lorsqu’on parle de principe d’incertitude, cela nous ramène à la physique quantique, et plus précisément à Heisenberg, qui en 1927, a démontré l’impossibilité de connaître simultanément la position et la vitesse d’un électron. Une idée audacieuse à rapprocher de notre époque : et si ce principe, né dans le domaine scientifique, s’appliquait aujourd’hui à la géopolitique et à l’économie ? L’année 2024 s’était conclue sur des tentatives de résolution des conflits en Ukraine et au Moyen-Orient, sous l’égide du droit international et à travers des structures comme l’ONU ou l’OTAN. Mais ces deux conflits, aux racines et aux dynamiques très différentes, continuent de bouleverser non seulement l’ordre géopolitique mondial, mais aussi l’économie et le quotidien de chacun, alimentant une inflation persistante.

Trois mois plus tard, nous assistons à une escalade commerciale sans précédent depuis 1929, accompagnée d’une remise en cause profonde des fondements mêmes de nos démocraties établies depuis la Seconde Guerre mondiale.

L’éducation, l’accès aux soins, la protection des minorités, les droits des femmes à disposer de leur corps, la séparation des pouvoirs, la souveraineté territoriale (y compris celle du Canada ou du Groenland), la liberté de la presse : tous ces piliers vacillent sous les coups répétés d’un discours autoritaire et de décisions unilatérales.

Dans un tourbillon de décrets présidentiels successifs, d’humiliations publiques infligées à des dirigeants étrangers, de projets pharaoniques au Moyen-Orient, et de leçons de gouvernance prodiguées par des idéologues radicaux, nous assistons à une ère où tout peut être affirmé et aussitôt contredit.

Un choix affirmé un mardi peut être renié le mercredi au nom du même « bon sens ». Ce n’est plus seulement de l’instabilité : c’est l’instauration d’un nouvel ordre dominé par l’aléatoire. Nous sommes entrés dans un monde d’incertitude permanente, où les repères que nous pensions immuables s’effondrent.

Face à cela, il nous faut repenser nos certitudes. Pour une génération qui tenait pour acquis que les États-Unis étaient le pilier de l’OTAN, de l’ONU, du commerce mondial et de la stabilité internationale, ce basculement impose de nouveaux réflexes. De nouvelles voies sont à explorer — économiques, morales, politiques. Car au final, les marchés financiers ne sont que le miroir des économies qu’ils représentent, mais aussi du degré de confiance qu’on leur accorde. Et sans confiance, il sera bien difficile de reconstruire les fondations d’un nouvel équilibre.